Pour clore sa saison artistique, le Comptoir des Mines Galerie présente « Après le feu », l’exposition phare de Khadija Jayi, artiste avec laquelle la galerie entretient un dialogue fascinant depuis plusieurs années. Khadija Jayi n’a eu de cesse de développer une œuvre exigeante et profondément habitée depuis sa première exposition individuelle au Comptoir des Mines en 2022 où le feu devient à la fois médium, langage et révélateur. L’usage du « feu » n’est jamais ici un geste spectaculaire, mais une nécessité intérieure : une manière d’éprouver la matière pour faire surgir des formes chargées d’émotions, oscillant sans cesse entre douleur et lumière, tension et apaisement, effondrement et espérance. Depuis plus de quinze mois, le Comptoir des Mines accompagne l’artiste dans la conception et la production de cette exposition, pensée comme un ensemble cohérent et immersif. Les œuvres présentées révèlent certaines fois des papiers brûlés, travaillés par le feu et représentant des motifs inspirés de la couture traditionnelle de territoires soumis aux violences de guerres et des affrontements internes. Ces formes, fragiles et incisives, convoquent la mémoire des gestes, des cultures et des transmissions, tout en suggérant la trace de brûlures plus vastes : des blessures collectives qui marquent certains paysages et certaines histoires.
D’autres œuvres plongent dans une dimension plus intime, faisant écho au passé intérieur de l’artiste. Le feu y devient le témoin d’un regard social pesant, parfois jugeant, parfois destructeur. Brûler, ici, c’est exposer la violence invisible des projections, des attentes et des jugements portés sur les corps et les trajectoires de vie des femmes qui luttent pour leur émancipation. Khadija Jayi s’affirme ainsi comme une témoin lucide et sensible de son époque, capable de traduire avec justesse les sentiments qui nous traversent et nous consument sans jamais les illustrer frontalement.
Enfin, « Après le feu » s’ouvre sur un espace de renaissance. Lorsque tout semble consumé, la cendre devient fertile. Des formes circulaires ou rectangulaires émergent, baignées de vibrations lumineuses et de mouvements amples, comme autant de signes d’une possible régénération. Après la destruction, la vie apparaît et installe un nouveau lexique de couleurs et de formes. C’est dans cet équilibre fragile entre perte et recommencement que l’œuvre de Khadija Jayi trouve sa force et nous sert d’exemple.
“Après le feu” du 20 décembre 2025 au 25 janvier 2026 au Comptoir des Mines Galerie, Marrakech.









