Qu’est-ce qu’un héros? Quelques soient les définitions diverses et variées que l’on peut donner au 21ème siècle, on retrouve toujours la notion de centralité d’un personnage dans l’oeuvre.
Ainsi, il est courant de dire que le “héros” d’un film ou d’un roman est toujours le “personnage principal”, qu’il soit exemplaire, détestable, ordinaire ou extraordinaire.
Pourtant dans l’Antiquité, la définition était plus réduite. La mythologie gréco-romaine ne proposait que des héros aux parcours exceptionnels. Cela s’illustrait à travers la production d’oeuvres d’art qui décrivaient les formidables épopées menées par des demi-dieux. Et déjà, le héros servait à nourir la propagande et à défendre des idéologies politiques et religieuses… une mécanique qui reste quelque part d’actualité.
A l’époque moderne, et avec l’émergence des nouvelles formes d’arts visuels, tels que le graphisme, la photographie, la bande dessinée ou encore le cinéma, on retrouve toujours la centralité du héros, sans qu’il soit toujours un demi dieu. Pendant qu’en Union Soviétique on célébrait “l’ouvrier du mois” à travers la production d’affiches et de films, aux Etat-Unis, on glorifiait des personnages fictifs aux superpouvoirs avec les Comics et dans les grandes salles de cinéma.
Aujourd’hui, avec le développement des masse-médias, l’intéractivité aidant, tout le monde peut devenir un héros.
Afin de créer cet événement dédié au dessin contemporain, nous avons demandé à plusieurs artistes multidisciplinaires de proposer des visions croisées sur la notion du héros. En privilégiant la technique du dessin dans toutes ses formes, un médium qui repousse aujourd’hui constamment ses limites.
Ainsi, certains artistes font référence à des périodes de l’histoire et à des personnages connus, d’autres proposent une vision beaucoup plus personnelle, souvent abstraite.
À l’exemple du poète berbère représenté par M’Barek Bouhchichi, descendant d’esclave et qui a longtemps chanté contre les conditions d’esclavage en poésie Tifinagh, revendiquant ainsi le droit des noirs à la dignité.
Anuar Khalifi quant à lui, représente de manière plus générale sa vision d’un monde marqué par les extrémismes, la consommation et le matérialisme avec des personnages représentés comme des derviches ou des antihéros perdus, évoquant pour la plupart des stéréotypes sur l’Orient.
Nous faisons face également à l’absence de héros, avec les collages de Simohammed Fettaka qui illustre une révolution sans Héros. Ou une vision brouillé du statut du soldat, qui peut être à fois héros et antihéros.
Mo Baala va jusqu’à s’approprier le personnage du Petit Prince « comme un exemple d’état mental qui renforce la pensée imaginative quand on pense que nous sommes perdus dans des situations de vie précaires ». Rita Alaoui, quant à elle, interprète l’Homme en symbiose avec l’arbre symbolisant l’ancrage, l’équilibre, le flux de la vie, et de la résistance dans un monde faux, pollué et artificiel.
Avec 12 artistes et 26 oeuvres, dont certaines ont été spécialement produites pour cet événement, cette exposition rend hommage a certaines figures héroïques ou du moins exemplaires, mais se révèle être également une forme de revendication, ou un autoportrait de l’artiste, tout en donnant un aperçu du Héros/Anti-héros des temps moderne pour interpeller l’imaginaire collectif.
Texte extrait du catalogue de l’exposition.